Comment avez-vous contracté l’hépatite C ?
J’ai été contaminé en 1979 à cause d’une transfusion sanguine, au cours d’une opération du coeur. J’avais 13 ans. Dans ma malchance, j’ai eu de la chance, car j’ai échappé au Sida (on était au début de l’épidémie). Je n’ai eu "que" l’hépatite C. Mais je n’ai pas été diagnostiqué tout de suite, car la maladie n’était pas encore identifiée à cette époque.
Justement, à quel âge avez-vous été diagnostiqué ?
À 25 ans. Comme j’étais un peu hypocondriaque, j’ai passé un bilan de santé pour vérifier si tout allait bien, et c’est là qu’ils ont décelé que j’avais une hépatite C.
Quel sont les effets de la maladie ?
C’est un virus qui attaque le foie. Du coup, il fait moins son boulot de purification du sang. Ça génère également une fatigue supplémentaire, ainsi qu’une irritabilité et des idées noires. Je n’étais pas bien dans mes baskets à l’adolescence, et j’ai fait un séjour en hôpital psychiatrique. J’ai réalisé des années plus tard que c’était en partie lié à ma maladie.
Le fait d’être diagnostiqué a changé quelque chose ?
Pas au début, car je ne me rendais pas compte de ce que cela représentait. Ce n’est pas une maladie spectaculaire dans le sens où elle ne se voit pas. J’ai toujours eu des sautes d’humeur et des excès de fatigue, je pensais que c’était juste dans ma nature.
Et il n’y avait pas encore de traitement à l’époque…
Non. On m’a annoncé que j’avais une maladie grave, qui pouvait évoluer en cirrhose ou en cancer du foie, mais qu’il n’existait pas encore de traitement. Donc pendant toute une partie de ma vie, j’ai vécu avec une épée de Damoclès au dessus de ma tête, sachant que je ne pouvais rien faire. Mais j’ai relativisé. Je voyais des copains mourrir du Sida, je n’allais pas me plaindre parce que j’avais une hépatite C.
La maladie vous a-t-elle handicapé d’un point de vue professionnel, notamment sur le tournage de Plus belle la vie ?
Non. J’ai refusé que la maladie soit un frein, et j’ai toujours bossé normalement. D’ailleurs, j’officiais en tant que journaliste sur LCI quand le premier traitement est arrivé, au début des années 2000.
Un traitement que vous avez suivi 6 mois…
Oui, il était expérimental et avait un taux de réussite de 50%. Mais les effets secondaires étaient très difficiles à supporter, c’était l’enfer. Je perdais mes cheveux, j’avais mal dans les jambes, des poussées de fièvre à 40°, sans parler des sautes d’humeur. C’est d’ailleurs à cette époque là que j’ai divorcé. Entre nous on l’avait surnommé "le traitement des divorces", car nous étions plusieurs dans ce cas.
Le traitement a-t-il marché ?
Au début, on ne trouvait plus du tout de trace du virus dans mon organisme. J’ai vécu un an en pensant que j’étais guéri, mais ce n’était pas le cas. J’ai dû attendre dix ans de plus. Le déclencheur a été la mort de David Bowie, en janvier 2016.
David Bowie, qui est mort d’un cancer du foie…
Je me suis dit : "C’est peut-être ce qui t’attend. Est-ce que tu as vraiment envie de mourrir d’un cancer du foie ?" Aujourd’hui j’ai 50 ans, une fille de 10 ans que j’adore, une femme magnifique que j’aime… Donc non ! Je savais qu’il y avait un nouveau traitement, qui avait eu des résultats spectaculaires aux Etats-Unis, avec un taux de réussite de 90%. J’ai donc pris contact avec mon médecin, et comme mon foie était suffisamment abimé, j’ai eu droit à ce traitement.
Peut-on dire que vous êtes guéri aujourd’hui ?
Les médecins ne veulent pas utiliser le terme "guéri" pour l’instant, et je continue mon suivi. J’espère que je n’aurai pas de rechute, mais d’après les médecins ça serait très surprenant. Et surtout, je me sens mieux. J’ai 50 ans et je revis.
Pourquoi parler de votre maladie aujourd’hui ?
D’après l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) 367 000 personnes ont été contaminées par le VHC en France et 232 000 d’entre elles sont porteuses chroniques du virus. L’hépatite C chronique serait responsable de 2 700 décès par an. Donc je veux sensibiliser les gens, notamment à se faire dépister. Quand on est atteint d’une maladie, il est important de la traiter le plus tôt possible. Ensuite, je veux qu’on se mobilise pour obtenir une baisse des tarifs, de sorte que la totalité des malades soient traités. C’est un traitement qui coûte très cher, 38 000 euros pour trois mois, et ce n’est pas normal de devoir attendre d’être suffisamment malade pour pouvoir être soigné.
Un dernier message à passer ?
Je voudrais remercier le médecin qui m’a suivi toutes ces années et qui est formidable, ainsi que l’équipe de jour du service des maladies infectieuses de l’hôpital Tenon à Paris. Ils ont fait preuve d’une empathie et d’une disponibilité qui a été extrêmement précieuse pour moi.